L'histoire du château
Moncontour, place-forte
de Penthièvre.
Au
XVIe siècle pourtant, la communauté moncontouraise
néglige l'entretien de ses fortifications. En raison de l'absence
de volonté de tenir la place en état de combattre,
les particuliers investissent progressivement les espaces disponibles
de constructions et d'aménagements divers, comblant les douves
et rendant les fortifications de plus en plus vulnérables.
Et si Jean de Penthièvre fait construire un nouveau château
à Lamballe dès 1555, il néglige totalement
de faire respecter les conditions d'opérationnalité
de Moncontour. Il faut attendre 1579 pour que des restaurations
soient apportées au château, et elles ne concernent
que son état général. En gagnant la Bretagne
à cette époque, les guerres de religion vont brusquement
rappeler leurs responsabilités aux moncontourais.
Si la ville appartient au duc de Mercoeur au début du conflit
en 1590, elle est prise dès les premiers mois par les royaux
qui la conservent en dépit de nombreuses attaques jusqu'à
son terme en 1598. La nouvelle de l'arrivée des troupes royales
conduites par le prince de Dombes en juillet 1590 provoque la remise
en état hâtive de la place. La population, soutenant
le parti ligueur, s'active pour restaurer les tours ruinées,
dégager les espaces pouvant compromettre la sécurité
des dispositifs et leur efficacité. Mais les remparts ne
résistent pas aux deux énormes pièces d'artillerie
déplacées par l'armée royale ; les canons battent
le rempart et y ouvrent rapidement une brèche par laquelle
les troupes s'engouffrent. La garnison en place capitule. Le prince
de Dombes y installe une solide garnison confiée au capitaine
La Tremblaye qui tient les années suivantes les ligueurs
en respect sans prendre le soin de restaurer les fortifications.
En mars 1591 pourtant, profitant de son absence, Saint-Laurent parvient
à pénétrer avec quelques hommes dans la place
" soubz ombre de chartiers " et contraint la garnison
à se réfugier dans le château dont il entreprend
le siège les jours suivants. La Tremblaye, revenu sur Moncontour,
déjoue pourtant la surveillance de l'assiégeant, parvenant
à s'introduire dans le château dont il organise la
défense en l'attente des secours. Apprenant leur arrivée
par la route de Loudéac, Saint-Laurent, après avoir
laissé un rideau d'arquebusiers interdire toute sortie du
château, se porte à leur rencontre mais il est défait
par la cavalerie et les royaux n'ont guère de peine à
disperser les derniers ligueurs postés à Moncontour.
Après cet épisode, il faut attendre 1593 pour que
les ligueurs tentent à nouveau d'investir la place. Au début
du mois d'avril, Mercoeur attaque la ville par surprise, mais l'assaut
de la nuit du 3 au 4 avril n'a pour effet que l'incendie de nombreuses
constructions, telle la maison franche dite de Saint-Renan, appartenant
à la famille Gouicquet-Vaupatry, proche du château,
qui brûle avec tout son contenu. L'attaque d'août est
beaucoup plus importante. Alors que les assiégeants doivent
vaincre la résistance de la ville défendue par Sarrouette,
ils doivent à leur tour résister aux harcèlements
des cavaliers de Du Plessis de La Roche basé au château
de La Touche en Trébry. Découragé par des actions
menées de part et d'autres par les défenseurs de la
place, Mercoeur lève finalement le siège et abandonne
la ville qu'il ne retrouvera qu'au terme du conflit.
Les principaux dégâts signalés à cette
époque sont une conséquence directe du siège
de 1590. Une contribution est levée en octobre 1597 pour
effectuer les restaurations aux deux grandes brèches qu'ont
réalisé dans le rempart les deux fameux canons de
l'armée royale. Mais au lendemain des guerres de La Ligue,
si le maintien en état des fortifications est souhaité
par César de Vendôme pour assurer la réussite
de ses intrigues, la communauté n'oeuvre plus quant à
elle qu'à la restauration des édifices religieux et
publics ainsi qu'à la voirie de la ville pour lesquelles
elle consacre la totalité de son budget. Contrairement aux
forteresses de Lamballe ou Guingamp, Moncontour échappe par
la condition de son propriétaire, demi-frère du roi,
aux prérogatives exprimées par l'assemblée
parlementaire d'août 1614. Elle n'échappe plus à
la démilitarisation lorsqu'en 1624 celui-ci se compromet
contre son frère qui ordonne enfin la destruction de la citadelle.
Celle-ci n'est pourtant que partiellement dégradée.
Les démolitions engagées restent partielles et superficielles.
A
partir du XVIIe siècle, l'état des fortifications
ne cesse de se dégrader. Seul ce qui nuit à la sécurité
des usagers et des habitants peut être l'objet de travaux.
La population se consacre à de nouvelles activités
artisanales et industrielles, laissant les dispositifs disparaître
avec les dégradations naturelles ou les aménagements
dus à l'activité humaine ainsi que les réemplois
de matériaux. A la fin du XVIIe siècle, les remparts
sont encore dans l'ensemble bien conservés : les courtines
et les tours ont partiellement conservé leurs parapets ainsi
que leurs créneaux, et certaines tours, comme celles du château,
ont même conservé leurs toits. L'action des facteurs
climatiques, considérable sur quatre siècles avec
notamment celle des tempêtes (1735, 1751), endommage la structure
supérieure des édifices et provoque les éboulements
des tours et des murailles, comme à la Porte d'En-Bas.
Ainsi, outre l'ensemble du rempart qui encercle la ville, ce sont
donc les vestiges d'un château comblé que le visiteur
peut découvrir aujourd'hui à Moncontour. Nous pouvons
imaginer que les archéologues du futur auront la chance de
procéder à son dégagement, ainsi qu'à
la fameuse tour Mognet, remarquable ouvrage réalisé
par Olivier de Clisson vers 1400 et comblée également
A moins que le temps n'ait, d'ici là, fait son ouvrage et
que l'on ne se préoccupe de ces vestiges que lorsqu'ils se
seront effondrés. Le sort aura été ironique
aux places-fortes de Penthièvre : Guingamp et Moncontour
sont comblés ; Lamballe est totalement arasée !
Texte de Bertrand
L'Hôtellier
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