L'histoire du château
C'est
finalement du Nord que vint le danger quelques décennies
plus tard, lors de la Guerre de Trente Ans. Ce conflit religieux
et politique apporta une indescriptible misère dans la vallée
de Saint-Amarin. En 1632, les troupes suédoises, alliées
des Protestants, déferlèrent sur le Sundgau et investirent
une à une les places fortes de la région. L'abbaye,
craignant de voir tomber la forteresse, la cèda aux troupes
du duc de Lorraine Charles IV, allié des impériaux
pour un an. Elle demanda par la suite aux Français d'investir
la place afin de la mettre sous la protection de leur roi. L'abbaye
souhaitait surtout protéger les archives qu'elle avait placées
au château ! Les Français encerclèrent Wildenstein
et s'en emparèrent après un siège de plusieurs
mois, en août 1633. Les lorrains purent se retirer librement
du château avec les honneurs.
Pour les habitants de la vallée, la présence française
ne changeait rien sur le fond. Mais une fois maître de la
place, le colonel De la Bloquerie exerça dans la région
une tyrannie sans pareil. Voici l'extrait d'un compte rendu donné
à l'administrateur de l'abbaye de Murbach :
« Il veut impérativement ses 119 Reichstaler. Il demande
également 20 à 30 hommes pour les corvées,
ainsi que tout le gibier et les poissons qui sont attrapés
dans la vallée. S'il pouvait nous arracher la peau du dessus
de la tête, il le ferait ». Le commandant exigeait également
des administrateurs des trois villages de la vallée haute
« qu'on approvisionne le château en bois sec, paille,
foin, et farine ».
Au début de l'année 1635, le duc Charles IV projetant
de repasser en Lorraine pour s'y rétablir par la force, reprit
l'offensive. Il entra en Alsace et reprit le château du Wildenstein
après avoir taillé en pièces la garnison française
qui le gardait. Enfin, en 1646, les Suédois reçurent
l'ordre de s'emparer du dernier bastion impérial dans le
Sundgau et enlevèrent le château du Wildenstein aux
Lorrains. Cela se fit plutôt par la ruse que par la force
des armes.
On raconte qu'un paysan de Kruth, maltraité par le gouverneur
de la forteresse, aurait suggéré au commandant suédois
de faire transporter des canons, la nuit, sur la "colline"
faisant face au château et qui le dominait. Le général
fit bon accueil à cette ruse et donna l'ordre de recouvrir
le chemin qui menait à la montagne avec de la paille et du
foin, et de faire recouvrir les roues des canons avec des chiffons.
De leur position en surplomb ils tirèrent sur la forteresse.
Les Lorrains jugèrent la résistance impossible. Ils
quittèrent leur position dans l'obscurité et s'en
retournèrent par l'escarpement de la forêt. Ils entendirent
le bruit formidable du bombardement et des murs qui chutaient dans
les profondeurs, que répercutaient les échos de la
montagne. C'était le 7 avril 1646.
En 1693, les villages de Kruth, Oderen et Fellering furent autorisés
à prendre les pierres de taille de la forteresse pour reconstruire
l'église paroissiale d'Oderen, et d'autres, pour la construction
de maisons à Kruth. En 1699, des maîtres-verriers sollicités
par l'abbé de Murbach pour exploiter la forêt s’installèrent
dans le fonds de la vallée. Le hameau se nommait au XVIIIe
siècle "die Glasshütte hinter Wildenstein"
(la verrerie derrière Wildenstein). Il sera érigé
en commune indépendante en 1796.
La ruine
Le château occupe toute la plate forme sommitale du Schlossberg
sur une longueur de plus de 200m. Les vestiges datent principalement
du XVIe siècle. L'accès se fait par une barbacane.
L'entrée est constituée d'une galerie de 20m de long
creusée entièrement dans le rocher.
Elle a nécessité l'emploi de 10 mineurs durant une
période d'un an ! Au milieu de la place est discernable l'emplacement
de la chapelle. Une importante construction mitoyenne sur cave voûtée
était probablement l'habitation de l'administrateur de la
forteresse. Sur le coté Est, le château surplombe la
route d'une centaine de mètres. Du coté Sud, la vue
est superbe sur les villages environnants. Au Nord, se dessine le
lac de Kruth - Wildenstein. Le département, propriétaire
des ruines, s'est attaché à les restaurer durant quelques
années. Des passerelles devraient être prochainement
installées à l'emplacement de la Barbacane.
Texte de WILD
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