L'histoire du château
Au
XVIe siècle, les Budos parviennent à se rapprocher
du Roi, par les alliances et par les armes. Jean (1492-1560) sert
en Italie sous François Ier, ; il est blessé à
Pavie en 1525. A son retour, il construit probablement la galerie
à arcades et le pavillon de l'escalier droit, dans la cour
du château de Portes. Son fils Jacques (1537-1598) accompagne,
outremonts, Henri II avec le duc de Guise.
Cependant l'influence de la Réforme croît, particulièrement
en Cévennes. A la mort de son père, Jacques de Budos
prend parti pour les protestants qu'il soutiendra jusqu'à
leur défaite à Jarnac, en 1569. Il rejoint ensuite
l'armée royale, où il sert dans la compagnie de Trente
Lances dont a la charge son cousin Guillaume de Joyeuse, lieutenant
du Roi en Languedoc. En 1570, il reçoit le collier de l'ordre
de Saint Michel et prête serinent de fidélité
au Roi. Il est comblé de faveurs par Henri III, qui le nomme
gentilhomme ordinaire de sa Chambre, puis le fait vicomte de Portes
et baron de Theyrargues en 1583. Quelques années auparavant,
il a vendu sa baronnie de Budos, abandonnant définitivement
la Guyenne au profit du Languedoc.
Tandis que l'Edit de Nantes ramène la paix pour un temps,
Henri IV nomme le vicomte de Portes chevalier de l'ordre du Saint-Esprit.
Mais il meurt peu de temps avant la cérémonie de réception,
en 1597. Il aura servi sous cinq rois. Le début du XVIIe
siècle voit l'apogée de la puissance des Budos, alliés
aux plus grandes maisons de France.
C'est Jacques de Budos ou son fils Antoine-Hercule qui ont édifié
le Château-Neuf, accolé à l'angle Sud-Est de
la forteresse.
Louise de Budos, fille de Jacques, est mariée au connétable
Henri Il, de Montmorency ; une autre de ses filles, Laurence de
Budos, sera abbesse de l'abbaye de la Trinité de Caen, et
l'un de ses fils, Balthazar, est évêque d'Agde. L'aîné
des fils, Antoine-Hercule (1589-1629) est élevé à
la Cour avec le Prince de Condé, Henri II de Bourbon, qui
épousera plus tard sa nièce, Charlotte-Marguerite
de Montmorency. Dès 1610, il devient "mestre de camp"
du régiment de Languedoc, puis vice-amiral de France en 1613.
La même année, Louis XIII le fait marquis de 'Portes
et vicomte de Theyrargues. Il épouse Louise de Crussol, de
la puissante famille des dues d'Uzès, devient conseiller
d'Etat et lieutenant du Roi en Gévaudan et Cévennes,
avec pour mission de préserver le Languedoc des ravages des
protestants. A partir de 1621, il guerroie contre l'armée
réformée du due de Rohan, aux côtés de
Henri II de Montmorency, son neveu. En 1628-1629, Portes est attaqué
par Saint-André-Montbrun, lieutenant de Rohan, qui ne parvient
pas à s'en emparer; en revanche, Theyrargues est pris et
dévasté. Antoine-Hercule de Budos est tué le
27 mai 1729 au siège de Privas. Richelieu écrit à
Anne d'Autriche que "le pauvre marquis de Portes fut tué
hier misérablement en passant par un chemin découvert.
Il est regretté de toute l'armée ( ... ) Je supplie
Dieu qu'Il conserve ceux qui sont si utiles au service du Roi".
Sa fille, Marie-Felice de Budos (1628-1693) sera la dernière
de cette lignée. Après quelques années passées
auprès de sa tante au monastère de la Sainte Trinité
de Caen, Marie-Felice, à peine âgée de dix ans,
décida de se consacrer à Dieu par un vu de perpétuelle
chasteté. Elle vécut ensuite au couvent des Carmélites
de Paris, puis en sortit subitement en déclarant qu'elle
ne souhaitait plus prendre le voile. Sa mère, Louise de Crussol,
tenta alors de la marier, mais le voeu de chasteté faisait
obstacle, et Marie-Felice ne voulut jamais se démettre. Elle
rejoignit sa marraine, Marie-Felice des Ursins, veuve du due de
Montmorency, au Couvent de la Visitation de Moulins en 1649.
Après
la mort de son oncle Henri en 1651, fille majeure, héritière
du marquisat de Portes, elle entreprit de travailler à "la
conversion de ses terres" et s'attira de nombreux démêlés
avec les réformés : elle provoqua ainsi un début
d'émeute à Tharaux (1658) lorsque, pour faire cesser
le culte protestant établi depuis 1574, elle envoya cent
fusilliers. Elle fit jusqu'à la fin de sa vie de longs séjours
dans les Cévennes, résidant à Theyrargues,
où elle avait installé un couvent, et pendant l'été
à Portes, qu'elle décrit dans sa correspondance avec
le Grand Condé comme étant un lieu où "personne
n'entre sans décliner son nom et où l'on ne parle
que de poudre, de balles, de feux d'artifice". Elle déclare
également à ce Prince que "Portes est un château
très fort qui peut contenir les Cévennes..."
La révocation de l'Edit de Nantes (1685) amène les
sinistres dragonnades, les abjurations forcées. Les protestants
cévenols se battront pour la sauvegarde de leurs libertés
en engageant la "Guerre des Camisards" et se réfugieront
au "désert".
Etrangement, l'histoire du château de Portes nous ramène
constamment à celle des rapports de l'Eglise avec le temporel
: gardien d'une route de pèlerinage, inféodé
à une abbaye, possédé par deux neveux et un
frère de papes, on le trouve au coeur des trois guerres de
religion qu'ont connues les Cévennes : celle des derniers
Valois, celle de Richelieu et celle des Camisards.
Marie-Felice de Budos meurt à Paris en 1693 et lègue
tous ses biens aux princes de Conti.. Ils se succèdent à
Portes pratiquement jusqu'à la Révolution et morcellent
le domaine pour le vendre en 1782. Louis XVI achète le château
de Portes et en donne l'usufruit à son frère le comte
de Provence. Vendu comme bien national à la Révolution,il
a six propriétaires successifs et aboutit en 1841 entre les
mains de la famille Pagèze de la Vernède, qui tentera
de le protéger de la ruine.
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