L'histoire du château
4 - La croisade
albigeoise
Tels
étaient la cité et son " palais " quand éclata en 1209 la croisade
albigeoise. Jugé trop tolérant à l'égard de l'hérésie cathare -
religion dualiste à laquelle étaient acquis la plupart de ses vassaux
- Raymond-Roger Trencavel fut déclaré par Rome ennemi de l'Église
et de la Foi, et ses domaines furent " exposés en proie " par le
pape Innocent III. Tous les assauts des croisés catholiques se brisèrent
contre les défenses de la ville. Mais le 15 août 1209, après quinze
jours de siège, Raymond-Roger fut traîtreusement capturé alors que,
contraint par le manque d'eau, il était venu négocier dans leur
camp avec les barons du nord. Le chef de la croisade, Simon de Montfort,
le fit assassiner. Il avait 24 ans. Promu vicomte de Carcassonne,
Montfort fit de la cité son quartier général et la base opérationnelle
de la guerre de conquête qui devait lui livrer, quatre ans plus
tard, tout le Languedoc. Il fut tué en 1218 sous les remparts de
Toulouse révoltée. En 1224, son fils Amaury, héritier de ses conquêtes,
fut à son tour assiégé dans Carcassonne, au terme d'une longue guerre
de libération partie de la Provence, et conduite par les comtes
de Toulouse et de Foix. Il capitula, et le fils du vaincu de 1209,
Raymond Trencavel, reprit possession de la cité de ses ancêtres.
Le catharisme retrouva partout ses positions d'antan. Il fallut
que le Saint Siège relance la guerre, et la croisade royale de 1226-1229
annexa définitivement Carcassonne au domaine de la couronne de France.
5 - La cite royale
Pour
parer à toute nouvelle rébellion, Blanche de Castille ordonna le
renforcement des défenses. Une enceinte extérieure vint hâtivement
doubler les fortifications de la cité. Ce qui n'empêcha pas Raymond
Trencavel de venir l'assiéger à nouveau en 1240, à la tête d'une
armée de proscrits levée en Catalogne et dans les Corbières. Il
échoua de peu à s'en emparer. C'est ce qui décida saint Louis à
renforcer encore ses capacités défensives, d'autant que Carcassonne
avait acquis une importance stratégique nouvelle, comme place-frontière
face au royaume d'Aragon, qui tenait alors le Roussillon et la Cerdagne.
Les ingénieurs français réédifièrent l'enceinte extérieure selon
des principes très soigneusement étudiés. Ce formidable bouclier
construit en gros appareil régulier est en contrebas par rapport
à l'enceinte intérieure. Afin de permettre des manuvres aisées,
il fallut aménager en lices le terrain fortement incliné qui séparait
les deux enceintes ; cet aplanissement contraignit à déchausser
les courtines et les tours de l'enceinte intérieure ; on reprit
donc en sous-uvre les maçonneries gallo-romaines. Mais les
poussées exercées par le terrain et le seul poids des tours firent
pencher plusieurs d'entre elles. Elles penchent toujours. La légende
dit joliment qu'elles se sont jadis inclinées pour saluer Charlemagne...
Sur l'enceinte intérieure elle-même, les travaux contemporains de
saint Louis se bornèrent à la tour de Justice et, contre le château,
à la tour de la Poudre et au corps de bâtiment qui la relie à la
tour de la Chapelle. On fit encore diverses reprises à partir de
là jusqu'au front nord. Enfin, dans la ville, on édifia une vaste
barbacane en demi-cercle en avant de la grande porte du château,
dont elle fut séparée par un large fossé sans eau. L'ancien palais
des Trencavel devenait ainsi lui-même une formidable citadelle dans
la citadelle ; la garnison royale n'avait plus rien à craindre,
ni d'une occupation de la cité par des ennemis extérieurs, ni d'éventuelles
révoltes de la population. C'est à cette campagne, effectuée entre
1240 et 1260, que l'on doit les savantes défenses de la porte d'Aude,
et le système non moins sophistiqué par lequel la barbacane d'Aude,
aujourd'hui détruite, s'articule à la cité au terme d'un long couloir
crénelé. De 1280 à 1287, Philippe le Hardi, puis Philippe le Bel,
entreprirent de réédifier l'enceinte intérieure, de façon à normaliser
tout l'ensemble. Les travaux commencèrent près de la porte d'Aude,
à la tour de l'Inquisition, et furent menés à bien sur les fronts
sud et est, sur le modèle de l'enceinte extérieure, en gros appareil
très soigné. Interrompue, faute d'argent sans doute, à la tour du
Tréseau, cette deuxième campagne " royale " laissa tout le front
nord et nord-ouest en l'état, tel que les ingénieurs de saint Louis
l'avait restauré.
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