L'historique des seigneurs Du Castel
3 - Les Cadets des du Chastel
Conformément
à la règle du droit d'aînesse, la seigneurie du Chastel revint à
l'aîné de chaque génération du lignage, ce qui obligea les cadets
à chercher fortune ailleurs. Le service du roi de France leur offrit
un débouché majeur et trois d'entre eux s'y distinguèrent particulièrement.
Le premier, Tanguy du Chastel, était le dernier frère de Guillaume
II et d'Olivier 1er. Né vers 1370, il emboîta le pas à son frère
Guillaume au service de Louis d'Orléans. Il revint en Bretagne en
1404, dans le dessein de venger la mort de son frère. Pour ce faire,
il monta une expédition maritime, ravagea les côtes anglaises pendant
plusieurs semaines et détruisit le port de Dartmouth qui avait été
fatal à son frère aîné.
Sa vengeance accomplie, Tanguy retourna à Paris où il devint le
chambellan du duc d'Orléans. Mais celui-ci fut assassiné en 1407
sur ordre du duc de Bourgogne. Par ce geste extrême, Jean sans Peur
éliminait son principal rival à la conduite des affaires de nation
rendue vacante par la folie de son cousin le roi Charles VI.
Tanguy servit alors Louis II d'Anjou, roi de Naples et de Sicile,
en Italie. Commandant de ses troupes, il assiégea Rome victorieusement
en 1410 et permit ainsi au pape Alexandre V de retrouver la ville
éternelle. Si Tanguy du Chastel accepta de se battre pour ce prince,
c'est parce que ce dernier soutenait comme lui la maison d'Orléans,
qui n'était pas encore le parti des Armagnacs, et aussi parce qu'il
trouvait là l'occasion d'exercer son métier d'homme de guerre.
A son retour en France, il devint, grâce à l'appui de la maison
d'Orléans, gouverneur du comte de Ponthieu qui, suite au décès de
ses deux frères aînés, devint dès 1416 le dauphin Charles. Dans
l'intervalle, il servit le dauphin Louis qui le nomma en 1414 maréchal
de Guyenne. La cour lui confia, en 1415, la charge de prévôt de
Paris, dans le but de mettre de l'ordre dans la ville. Tanguy du
Chastel était dorénavant l'un des chefs du parti armagnac à côté
de Bernard VII d'Armagnac, alors connétable de France. Pendant son
exercice, Tanguy du Chastel dut faire face à de dangereuses tentatives
des partisans du duc de Bourgogne décidés à se rendre maîtres de
la capitale. Il étouffa dans l'ouf une première insurrection en
1416. L'année suivante, il déjoua un autre complot, à la dernière
minute, et repoussa l'avant-garde de l'armée bourguignonne qui comptait
s'emparer par ruse d'une des portes de la ville. A la suite de cette
victoire, il sortit
de Paris à la tête d'une armée et nettoya les environs. Il reprit
les places de Montlhéry et de Chevreuse, avant de faire le siège
de Senlis dont il ne put venir à bout.
La troisième tentative fut la bonne. Dans la nuit du 29 au 30 mai
1418, des Parisiens ouvrirent la porte de Saint-germain des Prés
aux troupes bourguignonnes de Villiers de l'Isle-Adam qui se répandirent
dans la ville. Tanguy n'eut que le temps de se précipiter chez le
dauphin, alors agé de seize ans, et l'emporta dans ses bras jusqu'à
la Bastille d'où il gagna Melun. Le dauphin ne devait revoir sa
capitale que dix neuf ans plus tard. Dans les jours qui suivirent,
la terreur bourguignonne s'abattit sur la ville et plusieurs centaines
d'Armagnacs furent massacrés. Le comte d'Armagnac fut au nombre
des victimes.
L'ancien prévôt se retrouva être le principal défenseur de ce qui
restait d'un parti qui avait été celui du duc d'Orléans et qui allait
devenir celui du roi de Bruges. Fidèle à sa vocation militaire,
il mena campagne en Ile de France et dans le Berry. Homme de confiance
du dauphin, il accomplit plusieurs missionsdiplomatiques auprès
du duc de Bourgogne afin de négocier la paix. Le 10 septembre 1419,
une entrevue entre le dauphin et Jean sans Peur fut organisée sur
le Pont de Montereau. Elle se termina par une échauffourée au cours
de laquelle le duc de Bourgogne fut assassiné. Présent dans l'entourage
du dauphin, Tanguy du Chastel passa pour être le principal instigateur
de ce meurtre.
Louis
d'Orléans était enfin vengé. Mais la principale conséquence de ce
meurtre fut de pousser les Bourguignons vers l'alliance avec l'Angleterre.
Dès 1420, le traité de Troyes reconnut le roi d'Angleterre Henry
V comme le régent du royaume de France. A l'annonce du décès de
Charles VI en 1422, Tanguy fit porter une bannière fleurdelisée
devant le dauphin et le reconnut comme le nouveau roi Charles VII.
Nommé maître de l'hôtel du roi, il continua néanmoins à porter les
armes. Il guerroya en Champagne puis en Bourgogne où il partagea
avec le connectable Jean Stuart le commandement de l'armée qui fut
défaite en juillet 1423 lors de la bataille de Cravant, près d'Auxerre.
Après la mort de Stuart à la bataille de Verneuil sur Avre livrée
en 1424, qui coupa au roi la route de Reins, Tanguy se rendit en
Bretagne pour proposer l'épée de connétable à Arthur de Richemont,
frère du duc de Bretagne.
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