| L'histoire des Remparts
 7 - La Ville
 
  Construite 
              d'après les plans établis par les ingénieurs du roi Louis IX, elle 
              était à peu près terminée lorsque saint Louis revint de sa première 
              croisade. La disposition de ses rues, parallèles et se coupant à 
              angles droits, l'emplacement de la place publique, aujourd'hui place 
              saint Louis, sont restés tels que lors de la construction. Rien 
              n'a été changé ni à l'alignement, ni à la largeur des rues. Mais 
              presque toutes les maisons ont été réédifiées ou restaurées. La 
              rue principale était la rue d'Artois qui partait de la porte du 
              même nom pour aboutir à la place publique. C'est aujourd'hui la 
              Grand Rue. 
 On peut regretter que, depuis moins d'un siècle, les divers propriétaires 
              n'aient pas respecté les délicats motifs qui ornaient la façade 
              de leurs immeubles. Les quelques sculptures de la Renaissance que 
              l'on peut encore admirer sur deux ou trois maisons, donnent une 
              faible idée de ce que devait représenter l'ensemble décoratif de 
              cette rue. Nous n'avons aux archives, et nous ne connaissons pas 
              ailleurs, aucun exemplaire du plan qui fut dressé pour la construction 
              de la ville au XIIIe siècle. Mais, par l'état des lieux, et les 
              divers et nombreux documents que nous avons consultés, nous pouvons 
              le reconstituer assez exactement.
 
 La partie nord-ouest était le quartier militaire, avec la place 
              d'Armes, le château du Gouverneur communiquant avec la Tour de Constance. 
              La rue longeant le rempart se dirigeant sur la porte de Montpellier 
              et la Tour des Bourguignons, s'appelait la rue de la maison du Roi, 
              et devait comprendre les logements des officiers subalternes de 
              l'état-major. Sur la place publique, l'espace occupé par 
              la halle actuelle et les immeubles voisins, et qui s'étendait en 
              profondeur sur une centaine de mètres de la rue des Moulins à la 
              rue du Thieure, appartenait aux moines de Psalmodi. Les autres immeubles 
              delà place publique étaient occupés par des mangoniers et autres 
              marchands. Il existait également sur la place publique une halle 
              couverte qui a été démolie à la fin du XVIIIe siècle. La rue de 
              la Marine qui était la partie du boulevard Gambetta actuel, allant 
              de la rue Pasteur à la porte de la Marine, avait toutes ses maisons 
              du côté du Levant construites en arcades. Elles étaient occupées 
              par des administrations ou par des nobles et de hauts fonctionnaires.
 
 Le quartier sud-est avait été réservé pour le couvent des Cordeliers 
              et la Poudrière; il était affecté à la population la plus pauvre 
              de la ville. Les maisons de ce quartier étaient si basses qu'un 
              homme pouvait toucher la toiture avec la main. Elles étaient bâties 
              sur un modèle uniforme, simple rez-de-chaussée, avec deux pièces 
              sans couloir, une donnant sur la rue servant de chambre à coucher 
              pour toute la famille. Ni plafond, ni plancher, ni carrelage, et 
              pas la moindre installation hygiénique. Il existe encore deux ou 
              trois spécimens de ces maisonnettes, servant de magasin, dans la 
              rue Emile-Jamais prolongée.
 
 Au XIIIe siècle, et pendant la courte période de la grande activité 
              du port et de la prospérité relative de la ville, l'emplacement 
              compris entre les remparts était entièrement recouvert de maisons 
              d'habitation; sa population était d'environ 15000 âmes, d'après 
              M. Alexandre Esparron. Mais, dès que l'activité du port déclina, 
              ce déclin qui s'accentua jusqu'à la création du port de Sète, en 
              1866, consomma la ruine de celui d'Aigues-Mortes; la ville se dépeupla 
              peu à peu. Elle n'avait plus que 2.000 habitants en 1770.
 
 De nombreux immeubles, non occupés, tombaient en ruines et, plutôt 
              que de faire des frais pour leur entretien, les propriétaires préféraient 
              les démolir. Il fallut une ordonnance de l'Intendant de la Province 
              en 1770, pour arrêter cette destruction. Au milieu du XVIIIe siècle, 
              existaient, et même jusqu'en 1875, nous nous souvenons avoir vu, 
              à l'intérieur des remparts, de grands espaces vacants, dont certains, 
              entourés de fossés à l'eau croupissante, étaient livrés à la culture. 
              Plus d'un quart de la surface intérieure de la ville était non-bâtie. 
              Mais, à partir de cette époque tous ces vacants ont été lotis, et 
              aussitôt recouverts de constructions à usage d'habitation ou de 
              magasins à vin.
 Extrait d'un texte 
              du Centre des Monuments Historiques  |