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             COUPABLE DE CROISADE 
            La croisade contre 
              les albigeois 1208 - 1243 
            14a - L'intégration  
            Depuis le traité de 
              Paris, les pays du midi étaient désormais sous la coupe du roi de 
              France : directement, pour les fiefs de Simon de Montfort, après 
              le  
              renoncement d'Amaury, son fils, indirectement, pour le comté de 
              Toulouse, avec le titre retrouvé de Raimond VII. Mais le traité 
              de Paris est un contrat inique qui refuse aux descendants de Raimond 
              VII la légitimité du titre. Seule la fille de Raimond, Jeanne, mariée 
              à Alphonse de Poitiers, frère de Louis IX, et enlevée de force à 
              sa mère pour être emmenée à Paris auprès de la régente Blanche de 
              Castille, est l'héritière du titre et des fiefs. Tout autre descendant 
              direct, même officiel, de Raimond VII ne sera pas reconnu. De plus, 
              si la princesse ne procrée pas, le comté de Toulouse sera automatiquement 
              intégré au domaine royal. Raimond VII, tenu par ce traité qui lui 
              a été exigé quasiment de force, essaiera de renverser la situation, 
              notamment en s'alliant au comte de la Marche, Hugues de Lusignan, 
              à qui il avait essayé auparavant de marier Jeanne. Le comte de la 
              Marche est le meneur de la ligue des seigneurs qui vont essayer 
              de lutter contre le pouvoir royal grandissant en se rebellant contre 
              la régente. Mais ce mouvement n'aura pas de suite, et Raimond sera 
              forcé de rentrer dans le rang. En 1249, Raimond VII meurt, la princesse 
              Jeanne hérite mais c'est son mari Alphonse de Poitiers, frère du 
              roi, qui devient comte de Toulouse. Il viendra à Toulouse seulement 
              deux fois avant sa mort en 1270. De retour de la VIII° croisade 
              au cours de laquelle Louis IX mourra devant Tunis, Alphonse de Poitiers, 
              meurt à son retour en France ; sa femme Jeanne, qui l'avait accompagné 
              en Croisade, meurt un jour plus tard. Selon les termes du traité, 
              le comté de Toulouse est intégré au domaine royal. C'est la fin 
              définitive du comté de Toulouse en tant que territoire autonome 
              et indépendant. 
            14b - Les coupables 
            Le Languedoc a été 
              dévasté pendant près de cinquante ans, il a perdu son indépendance 
              et une partie de sa culture et sa population a été décimée. Il remettra 
              des dizaines d'années pour se relever économiquement mais contestera 
              chaque fois qu'il le pourra le pouvoir central français. Qui sont 
              donc les responsables et les coupables ? Bien sûr, les languedociens 
              avaient embrassé une religion hérétique qui ne rentrait pas dans 
              la normalité du temps. Les seigneurs du midi ont protégé systématiquement 
              leurs sujets sans s'inquiéter de leurs croyances. C'était peut-être 
              de l'inconscience de leur part, mais peut-être était-ce plutôt de 
              l'inquiétude face aux menaces sous-jacentes exprimées par l'Eglise. 
              Le catharisme est une explication des besoins spirituels des languedociens, 
              mais certainement pas une menace directe pour la société occitane. 
               
               
              Ca l'a été par contre pour l'Eglise catholique, ou plus exactement 
              pour le Pape, gardien de l'intégrité et de l'orthodoxie de la Chrétienté. 
              Il est normal que le pape ait voulu lutter contre l'hérésie, et 
              nous l'avons vu, il a épuisé tous les moyens de redresser la situation. 
              Sa responsabilité dans le lancement de la croisade est revendiquée 
              et affirmée, mais sa faute fut alors de confier la croisade à des 
              personnages qui l'ont utilisée à des fins purement personnelles 
              et surtout intéressées. En fait, c'est bien les personnages-clefs 
              qui ont fait de la croisade ce qu'elle est devenue par la suite, 
              et non les idées développées d'un coté par l'Eglise et de l'autre 
              par les cathares. Les légats et les évêques du Languedoc et au premier 
              plan, Arnaud-Amaury et Foulques, évêque de Toulouse, sont directement 
              responsables de la croisade, de ses agissements et de ses égarements. 
              Ils sont coupables d'avoir abusé des pouvoirs qui leur avaient été 
              accordés par le pape ; ils sont coupables d'avoir imposé leur vision 
              personnelle de la lutte contre l'hérésie, et surtout contre les 
              seigneurs occitans. Ils sont aussi coupable d'en avoir profité pour 
              s'imposer comme un pouvoir politique incontournable et quelque fois 
              usurpateur. Ils ont été les maîtres réels de la croisade en étant 
              son guide moral, et en bénissant les massacres perpétrés par Simon 
              de Montfort. Ce dernier, quant à lui, n'a été que l'exécuteur des 
              basses-oeuvres en essayant de profiter de la situation pour se tailler 
              un domaine le plus grand possible. Ceci ne lui fut pas reproché, 
              au contraire. Car le but principal de la croisade n'a pas été l'éradication 
              de l'hérésie cathare, mais bien la conquête de territoires et le 
              remplacement d'une noblesse locale par celle qui conduisait la croisade. 
              Simon de Montfort, avec la bénédiction des légats et des évêques, 
              a détruit la dynastie des Trencavel, et luttera jusqu'au bout contre 
              celle de Saint-Gilles. La lutte contre l'hérésie n'a donné lieu 
              qu'à un massacre systématique mais qui aurait eu lieu même si les 
              seigneurs occitans avaient lutté au coté de l'Eglise ; l'apparition 
              de l'Inquisition est un épiphénomène de la croisade et constitue 
              une histoire presque séparée. 
               
              Pourtant, si les coupables principaux sont bien les meneurs de la 
              croisade, en paroles et en actes, il en est un qui profita en permanence 
              de la situation et tira à la fin, comme le dit la fable, les marrons 
              du feu : c'est la royauté française. Philippe-Auguste a joué en 
              permanence : avec les barons français, pour les envoyer à la bataille 
              conquérir une nouvelle province, avec Simon de Montfort, qu'il reconnu 
              comme vassal tout en sachant qu'il n'aurait jamais les moyens de 
              se maintenir et qu'il lui faudrait forcément faire appel à lui, 
              avec le Pape en exigeant des compensations disproportionnées pour 
              accepter son engagement par l'intermédiaire du prince Louis. Ses 
              successeurs continueront la même politique : Louis VIII négociera 
              avec le pape pour obtenir les titres de Aymeri de Montfort avant 
              la deuxième croisade, Blanche de Castille conquerra le Languedoc, 
              prenant dans ses rets Raimond VII en kidnappant sa fille la princesse 
              Jeanne. On peut dire de manière sûre que si le Languedoc n'avait 
              jamais intéressé le roi de France, il serait resté indépendant, 
              et l'Eglise aurait reconnu les droits de Raimond VII. La croisade 
              contre les Albigeois peut donc presque se résumer en une guerre 
              de colonisation du midi par le roi de France. Encore une fois, l'hérésie 
              ne fût qu'une parenthèse. Tôt ou tard, l'Eglise aurait trouvé un 
              moyen d'éliminer cet abcès, et il faudra de toute façon attendre 
              l'arrivée de pouvoirs réellement indépendants de l'Eglise, pour 
              voir une religion différente du catholicisme avoir un caractère 
              officiel. 
            Texte de Philippe 
              BEZARD-FALGAS (1997) 
            Retrouvez plus d'information 
              sur l'histoire Cathare sur le site www.cathares.org 
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