COUPABLE DE CROISADE
La croisade contre
les albigeois 1208 - 1243
6 - Le départ de la croisade
La croisade va s'organiser
très vite. Le roi de France, suivant ce qu'il avait dit, ne s'engage
pas militairement. Par contre, il va user de tout son poids pour
convaincre les grands féodaux français de s'engager. Cet aspect
n'est pas négligeable pour lui car il ne faut pas oublier que son
combat principal, c'est l'affaiblissement des grands féodaux, et
envoyer ceux-ci en croisade loin de leurs fiefs, c'est diminuer
leur influence. De grands seigneurs, et non des moindres, puisqu'on
verra le duc de Bourgogne, vont se croiser. Pour les plus grands,
c'est une occasion de négocier certains avantages avec l'Eglise.
Pour les plus faibles, c'est une occasion de conquérir un fief ou
de se forger un nom à la bataille.
L'armée se constitue sous l'autorité de l'Eglise. Son chef officiel
est le légat du pape, Arnaud-Amaury, alter-ego de Pierre de Castelnau.
Pour lui, la croisade n'a qu'un objectif : l'élimination physique
des hérétiques, c'est à dire le massacre systématique. Tous les
seigneurs et leurs troupes sont aux ordres du légat, mais l'armée
est aussi constituée de gens d'armes indépendants, les routiers,
qui ne suivent la croisade que pour piller et rançonner le pays
attaqué. Des routiers sont aussi utilisés d'ailleurs par le comte
de Toulouse, et ceci lui sera toujours reproché par l'Eglise, contrairement
à la croisade. Cet amalgame ne sera pas forcément très bon à la
fois pour la réputation des croisés, mais aussi pour leur efficacité
militaire. Du coté des seigneurs occitans, on sait à quoi s'en tenir
: les croisés vont attaquer les villes et les châteaux, piller les
richesses, déposséder les nobles et massacrer les hérétiques. De
plus, ils se sentent probablement abandonnés par le comte de Toulouse
qui a rejoint par force et par raison le camp des croisés. En première
ligne, c'est le vicomte de Béziers et de Carcassonne, Trencavel,
qui va subir les assauts de la croisade.
Un beau jour de 1209, la croisade se met en route, et désormais,
la ruine et la désolation vont s'abattre sur le pays d'Oc. Après
avoir passé Montpellier qui appartient au roi d'Aragon, les croisés
mettent le siège devant Béziers. Première déconvenue pour les croisés,
les catholiques de la ville refusent de coopérer et de livrer leurs
hérétiques. Désormais, la croisade sera obligée de combattre
la totalité de la population, et pas seulement les hérétiques comme
elle l'avait prévu au départ. La guerre de religion se transforme
en guerre de conquête. Le vicomte de Béziers, Raimond-Roger Trencavel
a laissé la ville à ses lieutenants et est allé s'enfermer à Carcassonne.
A l'époque, Béziers est une puissante ville fortifiée : juchée sur
un promontoire escarpé, elle est protégée en plus à l'Ouest par
l'Orb, rivière large et profonde. Les croisés s'installent et les
biterrois se moquent d'eux : ha ! Les fiers chevaliers dans leur
cote de maille en train de fondre au soleil ! Certains d'entre eux
poussent même la chose jusqu'à ouvrir les portes, et traverser le
pont sur l'Orb pour les provoquer ! Mais les routiers sont plus
prompts au combat que les seigneurs français : ils se précipitent
sur les audacieux, les taillent en pièces, foncent sur les portes
et pénètrent dans la ville. Avant que les croisés n'interviennent,
le massacre a déjà commencé et la ville est dévastée par les flammes
avant même d'être mise à sac... C'est à cette occasion que Arnaud-Amaury
aurait prononcé les célèbres paroles : "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra
les siens !" Tout le monde a entendu parler de cet épisode tragique.
Le premier fief de Trencavel est dévasté, et sa population massacrée.
Les historiens ne sont pas d'accord sur le nombre des victimes du
sac (entre 4.000 et 40.000 !) la ville ayant retrouvé une importante
population seulement une dizaine d'années plus tard. Toujours est-il
que l'Eglise a mis sa menace à exécution, et Béziers n'est que le
premier acte d'une longue série de combats et de massacres qui ne
s'arrêteront que près de quarante ans plus tard (1209 - 1244), avec
le bûcher de Montségur. Les croisés continuent leur progression
et arrivent devant Carcassonne. Là, les choses vont se ralentir
car il faut mettre le siège devant cette ville fortifiée. Trencavel,
à qui Béziers a tenu lieu de leçon, s'est mis à l'abri derrière
ses murs crénelés. Pourtant, Carcassonne tombera et son seigneur
avec. Venu négocier la reddition de la ville, Trencavel est fait
prisonnier par surprise et jeté dans un cul-de-basse-fosse. Le vicomte
étant dépossédé de ses fiefs, les croisés et le légat procèdent
alors à leur redistribution. Le légat propose les terres au noble
de plus haut rang, le duc de Bourgogne, en l'absence du suzerain,
le roi de France. Le duc refuse, ainsi que les grands seigneurs.
L'assemblée des croisés donne alors les terres à un seigneur du
Nord de la France, Simon de Montfort. Simon devient le nouveau vicomte
de Carcassonne, et en même temps devient le chef militaire de la
croisade. Pourquoi Montfort ?
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